
Olivier Zol
Céramiques opératives

L’étudiant alchimiste connait l’importance toute particulière de créer ses outils. Il se doit de concevoir en partie, le matériel spécifique à la voie qu’il a choisi, et qui va lui permettre de mener à bien ses travaux en conscience.
Quand la poterie rencontre l’alchimie, l’élaboration de ce matériel traditionnel répond alors à des lois ancestrales qui nous dictent les proportions, les positions, les matériaux….,
Pour renouer avec les souvenirs profonds, s'engage alors un long chemin d’expérimentation où la pratique au laboratoire doit venir confirmer les intuitions de l’atelier.
Les céramiques présentées ici sont le fruit de cette pratique qui s’inscrit dans le sillon alchimique et spagyrique des anciens. Ces dernières répondent aux élémentaires préparations de la philosophie : les fermentations, les distillations et les calcinations.
La terre (faïence ou grès ) y joue un rôle central. En effet, la terre cuite garde toujours une part de porosité ( y compris à haute température) qui autorise les matières travaillées (dans les règles de l’art) à pénétrer les vases, les rendant philosophiques et pouvant participer ainsi à l’accomplissement de l’œuvre.
L’utilisation de ce matériel est en soi plein d’enseignement pour son utilisateur qui doit avant tout se dépouiller de ses réflexes de laborantin. Ici, tout est beaucoup plus sensible, le toucher et l’ouïe sont privilégiés, et ce qui coulait de source doit se recomprendre à nouveau.
Un dispositif qui protège son contenu de la lumière est d’une grande utilité au laboratoire, pour le chercheur qui laisse les lois s’exercer à l’abri de son regard, et dans l’obscurité propice à toutes créations. Les cuiseurs de rosée seront heureux de pouvoir putréfier et distiller sans changer de vaisseau en y adaptant une tête de Maure, laissant le fœtus à l’abri de toute source lumineuse, à la manière d’un œuf.,.
De même, il me semble que l’absence de vue sur l’intérieur du ballon participe à rendre l’opérateur plus attentif . Il lui faudra maitriser les montées en température, et être en lien étroit avec sa matière, sans quoi, il serait vain d’imaginer aller plus loin sur le chemin alchimique des vases en terre.
Les systèmes de chauffe doivent faire l’objet d’une étude approfondie, avant de soumettre les vases et leurs contenus au feu. Dans ce contexte, pas question de brutalité, la chauffe doit se faire avec douceur et régularité, sous peine de voir les vaisseaux se détruire prématurément. A l’inverse, celui qui adoptera un comportement réfléchi, plein d’amour et de rigueur, se verra en possession d’un vase unique et déterminé, qui pourra renforcer le lien .
Olivier Zol /2020 . Marseille